Comment ça a commencé ?

Avoir des formes, j’en avais toujours plus ou moins eu, depuis toute petite. Mon premier régime, je l’ai fait à l’adolescence. Puis je suis partie faire mes études. Là, j’ai profité de la vie, je me suis épanouie. 3 ans à Montpellier à profiter. Je mangeais mal cependant, je sortais pas mal… J’ai aussi été opérée de la thyroïde. Le tout cumulé, à la fin de ces années : +12kg. Je faisais 72kg pour 1m68 et j’acheté mes premiers shorts pour l’été en taille 44.
En arrivant à Bordeaux, j’ai décidé de me mettre une nouvelle fois au régime, un des plus célèbres… Le régime Dukan. Et là magie ! J’ai perdu plus de 15kg. Je passe sous le 60kg ! Encore plus légère qu’à mes 18 ans ! C’est magique ! Mais je refuse de manger avec les gens, car je dois respecter mon régime. Une proposition de soirée ? Non, je ne peux pas, je dois respecter mon régime.

Puis un soir, trop de privation, pas assez de joie… J’ai craqué et j’ai mangé tout ce que je pouvais manger chez moi. Mal, ballonnée, coupable… La culpabilité me rongeant… Je l’ai fait. Je me suis fait vomir. Un tour sur ma balance le lendemain et là le « bonheur ». Aucune répercussion suite à mon craquage ! Et si j’avais trouvé la solution pour profiter de la vie à nouveau, manger avec mes collègues, refaire des soirées en ne mangeant pas que des tomates cerises !

En plus, je commençais le sport. J’avais mon combo parfait ! Puis finalement non… Je mangeais tous les jours la même chose : que des fruits et légumes, je courrais pour perdre encore plus et dès que je craquais, je me faisais vomir. Mais sur la balance ça marchait ! C’était seule motivation.

52kg, je rentrais dans un 36, allongée, je les sentais ! Mes cotes, mes os… J’étais la première « fitgirl » française sur le site « Fitgril Code ». Je débutais les 30 days abs chalenge et je pouvais faire des « selfies bidou » sur Instagram. Je partageais mes recettes de burger, tiramisu aux m&ms sur les réseaux, mais sans dire qu’en les réalisant j’avais tout mangé et que si mes yeux brillaient après ce n’était pas dû à la fatigue liée au manque de sommeil… Mais celle de m’être faite vomir, celle qui épuise, celle qui ne libère finalement pas, mais m’enfermait dans un cercle infernal.

Ce qu’on ne sait pas…

Ton rapport à l’alimentation est alors totalement faussé. Une crise est comme une pulsion, tu ne sais pas comment ça va s’arrêter. Tu es capable de manger des quantités impressionnantes de nourriture. Tu ne pensais même pas qu’une personne pouvait manger autant ! Tu ne savoures plus aucun moment gourmand et surtout la notion de « faim », « avoir faim » ou « ne plus avoir faim »… Tu ne sais plus. Tu choisis tes aliments en sachant aussi ce qui sera plus simple à éliminer. C’est comme un Ulk en toi.

La boulimie détruit aussi physiquement. Elle t’épuise vraiment. Les crises sont des moments où tu épuises ton corps totalement. Il se crispe, se contracte. Le sang monte aux yeux, tu as le visage rouge, les larmes aussi. Les remontées d’acide à répétition te donnent mauvaise haleine au quotidien, mais surtout détruisent petit à petit tes dents. Tu perds tes cheveux. Tes glandes salivaires, ultra-sollicitées par les vomissements, gonflent le bas ton visage. Tu es essoufflée à chaque effort, faire du sport devient compliqué. Mais tu le fais pour perdre toujours plus, mais tu n’as aucune énergie.

La boulimie détruit socialement. Car tu ne savoures plus aucun moment. La culpabilité te ronge à chaque moment. Puis la fatigue créée par les crises t’isole. Tu mens pour éviter les repas, car tu as fait une crise il y a une heure. Tu perds confiance en toi car finalement tu rentres peut-être dans un 36 mais ça ne te donne pas le sourire. Et de jour en jour, tu le perds ce si beau sourire.

Et le pire c’est que tu te demandes pourquoi ? Pourquoi je mange autant pour vomir ? Pourquoi je fais ça ? Pourquoi je n’arrive pas à ne plus le faire ? Je suis faible ? Mais pourquoi ?!?

Comment s’en sortir

La boulimie est une maladie qui touche beaucoup de monde. Et comme toute maladie, on doit se soigner pour en guérir. Tout commence par l’acceptation, accepte le fait que, oui, tu es malade et tu as besoin d’aide. Tu dois en parler. C’est l’étape la plus difficile : oser en parler. Mais c’est là que tout commence. Car en parler, c’est aussi commencer à accepter. Accepter qu’on ait un mal-être, une chose dont on souhaite guérir. Mais à qui ?

En parler à tes proches :

J’ai commencé à en parler à mon mec (mon ex), puis une amie, puis d’autres personnes. Ca a été tellement dur, dur car j’avais honte, je me sentais faible. J’avais peur de leur regard. Puis finalement, ils étaient là (pour la plupart). Par contre sache une chose : tu ne peux pas leur demander de comprendre ce que toi-même, tu ne comprends pas. Tu ne peux pas leur demander les mots pour t’en sortir que toi-même tu ne trouves pas, de ne pas comprendre que le « mais tu ne devrais pas tu es belle » ne te fait plus rien. Mais maintenant, ils sont au courant, ils comprendront peut-être des choses, ils seront là quand ça ne va pas. Maintenant tu n’es plus seul, tu as une personne que tu peux appeler, avant ou après une crise, pour réaliser, prendre conscience de ce qui t’arrive car le réaliser c’est un peu accepter. 

Voir un professionnel (médecin, nutritionniste, thérapeute…) :

Tu es malade et la boulimie demande un suivi. Elle t’a déglingué tu ne sais plus manger autrement que pour combler tes émotions et par pulsions. J’ai décidé donc de voir une nutritionniste dans un premier temps pour réapprendre à manger. Manger pour vivre, pour avoir l’énergie nécessaire au quotidien, manger pour retrouver du plaisir, manger sans culpabiliser.

J’ai aussi compris que j’avais besoin d’être en paix avec moi-même. La boulimie peut traduire des maux plus anciens, des mal-être de l’enfance, un ex pas sympa sur ton image, le bazar créé par de multiples régimes ou autre. J’ai donc vu un psy pendant quelque temps.

Le sport :

J’ai aussi continué le sport, si je suis vraiment sincère, au début ce n’était pas sain. Je le faisais, car je reprenais une alimentation « complète » et je le savais… J’allais reprendre du poids. J’allais redevenir moi, j’allais retrouver mes formes, mais dans ma tête il était là, le « je vais prendre du poids… ne pas être jolie… ne pas plaire aux autres ». Je faisais du sport, trop de sport.

Et puis petit à petit j’ai aussi travaillé sur ça. Pour que mon corps et moi on soit pote (je te renvoie à l’article : Mon corps et moi justement). Car finalement, je mange bien, je me bouge, je suis un peu gourmande, mais je suis surtout moi, car chacun de ces moments me rend heureuse. C’est long, ça demande beaucoup de patience… Mais être en bonne santé et heureuse n’a pas de prix.

Petit à petit le sport m’a permis de prendre conscience de mon corps et de l’accepter tel qu’il était, sans contrôle, sans pression.

Apprendre à se connaître :

La boulimie c’est souvent : combler un trop-plein d’émotions par la nourriture. Alors on apprend sur soi. Je sais aujourd’hui ce qui peut me rendre heureuse ou l’inverse. J’essaye d’identifier les choses de la vie qui peuvent me générer du stress et comment les gérer pour que la boulimie ne revienne pas dans ma vie.

Chez moi c’est : la pression que je suis capable de me mettre dans ma vie professionnelle et personnelle, la solitude, la fatigue. Ces trois facteurs sont les principaux déclencheurs. Il y a aussi la sensation d’être submergée : par trop de travail, un retard, le bazar de mon appartement. Alors aujourd’hui encore, il va m’arriver d’avoir envie de compenser par de la nourriture. Mais j’ai adapté mon quotidien pour être le moins possible confrontée à ces situations, mais surtout réagir différemment. Appeler une amie, aller courir même 20 min quand je me sens débordée, prendre du temps pour moi en me chouchoutant, ranger mon appartement, car quand ce n’est pas le bazar chez moi, ce n’est pas le bazar en moi ou (beaucoup plus récemment, mais je vous en parlerai bientôt) méditer.

Alors non… On n’en parle pas, mais les troubles du comportement alimentaire touchent de plus en plus de personnes, de femmes et d’hommes. Quand on commence à en parler on se rend compte que tellement de personnes sont concernées. Quand on commence à en parler on fait un pas pour en sortir, pour s’en sortir. Alors ose en parler. Car tu n’es pas seul. Car tu retrouveras ton sourire, ta vie, tes amis, tes émotions…

Je sais à quel point ça peut être dur… Ca n’a jamais été aussi dur pour moi d’écrire un article… Je sais que le jour où je le publierai, ce sera encore pire… Mais je sais aussi que de lire ces mots m’aurait peut-être fait gagner quelques années de bonheur. Savoir que la boulimie n’est pas sans fin. Il est possible de s’en sortir. J’ai mis 2 ans, j’ai repris 15kg. Mais aujourd’hui, mon corps a changé, même mon visage. Mon corps, mon sourire, mon cœur rayonnent. Je rayonne à nouveau, pour moi, pour les gens que j’aime et pour vous alors qu’il y a encore 2 ans, je ne pensais jamais sortir de ce cercle infernal.